donderdag 14 februari 2013

Sur la famille...

Politique: La gauche et la famille, pourquoi c’est compliqué

L'Assemblée nationale vote aujourd'hui mardi 12 février en première lecture la loi sur le mariage pour tous. Après ces débats qui ont embrasé l’hémicycle, une loi sur la famille est annoncée pour fin 2013. Mais existe-t-il une vision de la famille propre à la gauche ?


Pour l’instant, rien n’est arbitré. En plein débat sur le mariage pour tous, dimanche 3 février, Dominique Bertinotti, la ministre de la famille, avait d’abord annoncé que la procréation médicalement assistée (PMA) serait l’un des points examinés dans une loi sur la famille en mars prochain. Las ! Le Premier ministre a recadré les choses : avant de légiférer, le gouvernement attend l’avis du comité consultatif d’éthique sur la PMA. Il devrait présenter un projet de loi fin 2013. « Le périmètre de la future loi sur la famille n’est pas arrêté pour l’instant, » confirme-t-on à Matignon. Elle pourrait examiner le statut du tiers, les conditions de filiation, l’autorité parentale, et statuer sur des sujets bioéthiques comme la PMA ou l’anonymat du don de gamètes. « Cette loi sur la famille s’adressera à toutes les familles indifféremment, hétérosexuelles et homosexuelles, » concède juste Dominique Bertinotti (voir l’interview). Politiquement, le sujet reste ultra sensible et pose de nombreuses questions : La famille passionne-t-elle François Hollande pour qu’il en fasse le sujet majeur de son début de quinquennat ? Rien n’est moins sûr. Y aura-t-il vraiment une loi en 2013 ? Les alliés du PS, communistes et verts, ont fait part de leurs doutes. Dominique Bertinotti y tient afin que la législation soit « en phase avec le quotidien de certaines familles », nous dit-elle. La gauche porte-t-elle une vision unique de la famille? Et dans cette remise à plat des normes familiales, où se situe la droite ? Enquête.

Cliché de famille
C’est l’image de la famille parfaite. Le 17 juin 1988, Ségolène Royal et François Hollande, alors en couple, posent, avec leurs trois enfants, Thomas, quatre ans, Clémence, trois ans, et Julien, un an. Le canapé est bariolé ; la boîte de céréales trône sur la table du petit-déjeuner ; le bébé biberonne son lait… Ce sont les débuts de la communication « pipolitique ». Ségolène, François et leurs enfants symbolisent la famille moderne des années 80, couple en union libre, travaillant tous deux, s’épanouissant dans leur rôle de parents. Ils répondent aussi au concept de « démariage » exploré par Françoise Dekeuwer-Défossez, juriste de la famille, auteur d'un rapport remis à Elisabeth Guigou en 1999. Dès les années 90, le droit civil de la famille est confronté, entre autres, à l'évolution sociale de la famille, à travers les divorces, les unions libres et les recompositions familiales qu'elle regroupe sous l'appellation « démariage ».

La suite de l’histoire Hollande-Royal a fait le miel des gazettes. Ils se sont séparés ; lui vit désormais en « union libre » avec une femme divorcée, mère de trois enfants. Le président de la République est un homme de son temps. Mais sa propre expérience de la famille « recomposée » influence-t-elle sa vision d’une politique familiale ? Dans ce domaine, il n’est pas idéologue. « Ce n’est pas son sujet, il n’en voit pas l’importance, tranche un proche. D’où ses tergiversations auprès des maires auxquels il promet la liberté de conscience avant de se rétracter auprès de l’inter-LGBT. ». Le président est en effet plus intéressé par les questions économiques et européennes que par les évolutions de la société. « Il a un côté giscardien, avance son ami, l’avocat Jean-Pierre Mignard. Il pense que les sociétés sont en auto-commande sur les questions de vie commune, que le législateur doit en prendre acte et fixer les limites. » En outre, il voit parfaitement l’intérêt stratégique d’une année 2013 passée à légiférer sur le mariage « gay », la fin de vie et la famille : cela occupe les Français et permet à l’exécutif de ne pas apparaître empêtré dans les plans sociaux et la crise économique.

La famille, une idée de droite ?
Longtemps, la gauche ne s’est pas intéressée à la famille. Le concept même était bien trop imprégné de relents pétainistes et s’accommodait mal des désirs individualistes nés de mai 68. La famille était associée à la droite. « Fidélité à nos racines, respect des personnes, volonté de transmission… Il y a dans la notion de famille, une idée qui fait écho aux droites françaises, » approuve Guillaume Larrivé, député UMP de l’Yonne. Après la Révolution française, la droite s’est réappropriée le mariage civil qui avait pour avantage d’induire de l’ordre social. Que la gauche se préoccupe des familles est très récent. « Après la victoire de 1981, l’idéologie de gauche fondée sur les questions économiques et sociales est peu à peu remplacée par des inquiétudes identitaires, culturelles et sociétales, » explique le politologue Laurent Bouvet, auteur de « Le sens du peuple » (Gallimard). En 1997, lorsque Lionel Jospin arrive à Matignon, justice sociale et réformes économiques sont ses priorités. Pas la famille. En 2000, quand Ségolène Royal devient ministre déléguée à la famille, elle n’a ni administration ni… locaux. Elle crèche dans un ancien immeuble de France Télécom, rue Brancion. Issue d’une famille catholique, imprégnée de cette culture, elle veut montrer que la gauche a quelque chose à dire sur le sujet : En rupture avec ses collègues socialistes, elle affiche un certain conservatisme. Elle maintient dans le code civil la mention que l’enfant « à tout âge, doit honneur et respect à ses père et mère ». Mais elle tient également compte de l’évolution des modes de vie : les délégations d’autorité parentale permettent au « parent social » dans les couples homosexuels de consolider ses liens avec l’enfant ; elle crée, en 2001, le « congé paternité ». « Elle a été une force motrice pour l’évolution de la famille en matière de droit, » confirme un conseiller politique de l’époque.

Le Pacs marque également un tournant. Il reconnaît l’aspiration des Français à choisir les modalités de leur vie de couple. En 1999, consigne est donnée par Lionel Jospin de ne surtout pas évoquer le mot « mariage » pour ne pas échauffer les esprits. Elisabeth Guigou, garde des sceaux, déclare même : « Il n’est pas question, ni aujourd’hui ni demain, que deux personnes physiques du même sexe, quel que soit leur sexe, puissent se marier. » Elle a changé d’avis.

Aujourd’hui, la gauche semble s’être convertie à la famille. Mais à laquelle ? D’un modèle familiale unique, notre société est passée à une pluralité de situations familiales, si bien que Dominique Bertinotti, actuelle ministre déléguée à la famille, aime se qualifier de ministre « des » familles. Elle use souvent de l’expression « Faire famille » qui induit l’idée d’une « fabrication ». « En réalité, elle est en phase avec une idéologie de déconstruction de la famille, critique Guillaume Larrivé. La gauche actuelle refuse l’idée de l’existence d’un modèle familial. Elle fait primer les désirs individuels. » Faux, rétorque-t-on à gauche : les députés UMP font preuve de ringardise, ils ne veulent pas accepter la société telle qu’elle est, ni même « protéger » les enfants des familles homoparentales. Dialogue de sourds.

Mais alors que le mariage pour tous sera voté, en dépit de la bataille législative acharnée, quel est l’objectif de la droite aujourd’hui ? « Faire reculer le gouvernement sur la PMA et bloquer toute amorce de légalisation de la GPA, » explique Guillaume Larrivé. Ce qu’il a commencé à faire en déposant au Conseil d’Etat le 5 février une requête en excès de pouvoir contre la circulaire de Christiane Taubira permettant la délivrance de certificats de nationalité aux enfants nés de mères porteuses.

« L’obsession de l’égalité »
Christiane Taubira dit, dans l’hémicycle, qu’elle veut « arracher les enfants au déterminisme de la religion et de la famille » ? Vincent Peillon avait déclaré, en septembre, qu’il fallait « être capable d’arracher l’élève à tous les déterminismes familial, ethnique, social, intellectuel » ? Le combat pour l’égalité, moteur du socialisme, irrigue les débats aujourd’hui. Historiquement, le socialisme français est marqué par la passion de l’égalité, concept porté par Tocqueville au XIXè siècle, contre la passion de la liberté qui anime les forces politiques américaines. La famille véhicule des traditions, des valeurs, de la spiritualité... Dès lors, la gauche la voit comme un creuset d’inégalités, une contrainte sociale, dont l’Etat doit libérer l’individu.

Cette « obsession de l’égalité » revendiquée par la gauche la conduit à envisager la scolarisation pour les enfants de deux ans afin de gommer les inégalités dès le plus jeune âge. Même ressort pour le combat sur le quotient familial : pendant la campagne présidentielle, l’équipe de François Hollande avait laissé entendre qu’il supprimerait le quotient familial au profit d’un crédit d’impôt par enfant, censé être plus « équitable »… Tollé à droite. « Les allocations doivent compenser la charge portée par les familles, quel que soit leur revenu, » réaffirme Jean-Frédéric Poisson, député des Yvelines (parti chrétien-démocrate). A contrario de la gauche, la droite considère que l’inégalité est un moteur créatif dans la société.

A gauche, combien de divisions ?
Le mariage et l’adoption « pour tous » fédèrent toutes les gauches, contrairement aux choix économiques qui les divisent. Sur la famille, les conceptions divergent. Ainsi les verts et les communistes ont-ils voulu intégrer la PMA pour les couples de femmes homosexuelles dans la loi sur le mariage pour tous. Ils ont déposé deux amendements en ce sens, qui ont été rejetés. Les verts apparaissent comme les plus libertaires et poussent aux réformes sociétales d’autant plus que ces alliés du PS doivent avaler des boas sur le plan économique, de Notre-Dame-des-Landes au nucléaire. Les communistes, eux, font leur petite révolution. « L’histoire du PC est marquée par une morale rigide, un sens de la hiérarchie, proche de la religion, raconte Laurent Bouvet. L’adultère, l’homosexualité ont longtemps été mis de côté. L’écroulement du système de référence, après la chute du mur de Berlin, a obligé les communistes à trouver de nouvelles idées, à se battre pour les nouveaux damnés de la terre, à savoir les minorités, notamment les homosexuels. »

Les députés PS sont divisés sur la question de la PMA. Carlos Da Silva, député de l'Essonne déclarait à lavie.fr, en décembre : « La PMA n’est autorisée aujourd'hui qu’à partir du moment où il y a un problème d’ordre médical. Si elle est autorisée pour des femmes mariées homosexuelles, nous sommes en rupture d’égalité flagrante car cela serait permis aux femmes mariées homosexuelles ou hétérosexuelles, mais on exclurait les célibataires… Ces couples auraient de surcroît accès à un droit auquel les couples d'hommes n’auraient, eux, pas accès. Cela entraînerait inévitablement un débat sur la GPA à laquelle je suis opposé. » Certes, François Hollande, tout comme Dominique Bertinotti et une partie du PS, se sont clairement exprimés contre les mères porteuses en raison d’une inéluctable « marchandisation du corps ». Mais le gouvernement compte des ministres pro GPA, dont sa porte-parole, Najat Vallaud-Belkacem.

Paradoxes de la gauche actuelle
« Que la gauche veuille étendre une institution synonyme d’ordre social, c’est déjà très étrange, note Laurent Bouvet. Mais surtout, avec ces lois accordant plus de libertés individuelles, elle se soumet aux injonctions du libéralisme. » Il est en effet curieux que le principe de précaution, cher à la gauche, concernant les filières agroalimentaires, la santé ou l’écologie, ne s’applique pas dans le domaine de la vie humaine. « La droite défend la dimension collective de la famille, la gauche a succombé au mirage de la souveraineté illimitée de l’individu! » renchérit Jean-Frédéric Poisson. Sacré paradoxe : Comment la gauche peut-elle penser les liens dans l’entreprise ou la transition énergétique tout en prônant la vision d’un individu entièrement maître de lui-même, de la conception de ses enfants au choix de sa mort ? La gauche légifère aujourd’hui sur les désirs individuels des couples et sur les situations familiales qu’ils engendrent. Philippe de Roux, du collectif Les poissons roses, proche du PS, s’interroge : « Est-ce que la politique est un acquiescement à un ordre du monde qui nous dépasse ou est-ce travailler à un monde tel qu’il devrait être ? » Une question qui sous-tend tout engagement politique.

http://www.lavie.fr/famille/la-gauche-et-la-famille-pourquoi-c-est-complique-12-02-2013-36351_413.php


Question intéressante: pourquoi la famille préoccupe-t-elle tant les politiques?


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