vrijdag 28 juni 2013

Quelqu'un m'a transmis...

...- -is si c'est un âne ou un écrivain du numérique, -isE si c'est unE blogueusE ou autrE...- ce lien.

La machine l'a reproduit trois fois... Je laisse, la machine fait quelquefois des choses auxquelles on ne s'attendait pas forcément...

http://www.lemonde.fr/idees/article/2013/06/03/luc-ferry-et-l-art-ne-comptant-pour-rien_3422897_3232.html

Il faut le reconnaître : on ne lit pas régulièrement les chroniques que Luc Ferry publie dans Le Figaro. C'est pourtant là une chose fort regrettable car un peu plus d'assiduité nous permettrait sans doute d'en apprendre davantage sur le regard qu'un homme politique peut porter sur l'art. Ainsi, dans son dernier article intitulé " Fric-Frac : des impostures de l'art contemporain " (16 mai 2013), Luc Ferry livre un très violent réquisitoire contre les Fonds régionaux d'art contemporain (FRAC) qu'il n'hésite pas à qualifier de " temples de l'inculture ".

Impossible de savoir s'il les a déjà fréquentés mais après tout, peu importe : il assure avoir lu une " excellente enquête " sur le sujet dans le magazine économique Capital – sans doute si excellente qu'elle lui suffit à fonder toutes ses prises de position. Sur un ton peu académique, Luc Ferry s'en prend donc à cette "fadaise de gauche" selon laquelle l'art contemporain doit être subventionné par de l'argent public et en profite pour brocarder les artistes accueillis par les FRAC, ces gens "sans art et sans talent" qu'il accuse même d'exploiter lesdits établissements pour " écouler leurs productions indigentes aux frais du contribuable ".

De la part d'un prof de philo qui touchait un salaire de l'Université Paris-VII sans y donner le moindre cours puis qui s'était fait rembourser ses indemnités par Matignon quand l'Université les lui réclamait, la critique peut sembler cocasse. Elle serait d'ailleurs simplement ridicule si elle n'était agrémentée de quelques contre-vérités notoires. A en croire Luc Ferry, soutenir la création avec de l'argent public serait parfaitement inutile car – attachez vos ceintures – les "grands hommes n'eurent jamais, ni de près ni de loin, le moindre besoin d'être subventionnés par qui que ce soit".

PICASSO PLUS RICHE QUE MICK JAGGER

Mieux : "les artistes véritables", ajoute-t-il, "et les écrivains les plus authentiques n'ont jamais été des marginaux, méconnus ou miséreux". Opposant les vrais artistes aux faux – dans une rhétorique qui n'est pas sans rappeler celle de Nicolas Sarkozy louant les vertus du " vrai travail " –, l'ancien ministre s'empresse d'attribuer des certificats. Et de classer dans la catégorie des vrais un Picasso plus riche que Mick Jagger, le " très fortuné " Voltaire ou bien encore le célébrissime Kant, aux conférences de qui " ministres et grands bourgeois se pressaient comme à une finale de Roland-Garros " (bonjour la comparaison...).

Dans tous les cas, l'équation est simple : ce qui prouve le talent d'un artiste et qui vient légitimer son statut, c'est d'abord sa capacité à gagner de l'argent et à devenir une "célébrité médiatique". Hors du royaume du fric et du vedettariat, point de salut : tout n'est qu'imposture. Faut-il seulement rappeler à Luc Ferry qu'à l'inverse total de ce qu'il affirme, un grand nombre d'artistes ont créé à la marge, que Lautréamont ne connut pas une once de succès de son vivant, que Van Gogh mourut en n'ayant vendu qu'un seul tableau et qu'à la fin de sa vie, Baudelaire lui-même était criblé de dettes et donnait des conférences qui ne déplaçaient plus les foules.

UNE FORME DE POPULISME PASSABLEMENT INQUIÉTANTE

Avec les mots de Dubuffet, il n'est pas inutile de lui faire remarquer que les chefs-d'œuvre mondialement connus devant lesquels il se prosterne ne constituent pas non plus forcément le meilleur et le plus important de la pensée d'une époque car leur " conservation résulte seulement de ce qu'un petit cénacle les a choisis et applaudis en éliminant tous les autres ". Il serait tout à fait naïf de penser que la culture se réduit à la courte liste des œuvres sélectionnées, promues, enseignées, et de ne pas voir qu'elle excède de très loin l'infime partie des productions matérielles sanctuarisées jusqu'ici.

Du reste, si Luc Ferry proposait de supprimer la subvention publique dans tous les domaines de la création, on pourrait au moins lui reconnaître une certaine logique. Hélas, il préfère exploiter le bon gros poncif qui consiste à dénigrer l'" art comptant pour rien ", prétendument hermétique et décadent, et stigmatiser une "camelote à prix d'or" achetée en prenant "dans nos poches". De ce triste inventaire à la Combien ça coûte ? découle une forme de populisme passablement inquiétante, notamment lorsque Luc Ferry déclare, à propos des " choses immondes " acquises par les FRAC, qu'il faudrait tout simplement "nous en débarrasser "... Imaginer un seul instant que cet homme fut chargé de faire notre éducation nationale laisse pour le moins songeur.

Qu'on se rassure cependant : Luc Ferry remplit lui-même les critères dont il use pour déterminer la valeur des " grands". Entre les conférences, les coffrets de disques retraçant l'histoire de la philosophie ou encore les croisières de luxe en sa " présence exceptionnelle ", il n'est ni miséreux, ni méconnu. Le Ministère de la Culture, toujours enclin à exercer son sens de l'humour, l'a d'ailleurs retenu pour parrainer une nouvelle manifestation qui s'annonce d'ores et déjà haute en couleurs : la " Fête de la Philo ". Espérons seulement qu'il saura contribuer au salut de cette noble discipline en s'abstenant d'y parler d'art.

Thibaud Croisy (artiste)



Il faut le reconnaître : on ne lit pas régulièrement les chroniques que Luc Ferry publie dans Le Figaro. C'est pourtant là une chose fort regrettable car un peu plus d'assiduité nous permettrait sans doute d'en apprendre davantage sur le regard qu'un homme politique peut porter sur l'art. Ainsi, dans son dernier article intitulé " Fric-Frac : des impostures de l'art contemporain " (16 mai 2013), Luc Ferry livre un très violent réquisitoire contre les Fonds régionaux d'art contemporain (FRAC) qu'il n'hésite pas à qualifier de " temples de l'inculture ".

Impossible de savoir s'il les a déjà fréquentés mais après tout, peu importe : il assure avoir lu une " excellente enquête " sur le sujet dans le magazine économique Capital – sans doute si excellente qu'elle lui suffit à fonder toutes ses prises de position. Sur un ton peu académique, Luc Ferry s'en prend donc à cette "fadaise de gauche" selon laquelle l'art contemporain doit être subventionné par de l'argent public et en profite pour brocarder les artistes accueillis par les FRAC, ces gens "sans art et sans talent" qu'il accuse même d'exploiter lesdits établissements pour " écouler leurs productions indigentes aux frais du contribuable ".

De la part d'un prof de philo qui touchait un salaire de l'Université Paris-VII sans y donner le moindre cours puis qui s'était fait rembourser ses indemnités par Matignon quand l'Université les lui réclamait, la critique peut sembler cocasse. Elle serait d'ailleurs simplement ridicule si elle n'était agrémentée de quelques contre-vérités notoires. A en croire Luc Ferry, soutenir la création avec de l'argent public serait parfaitement inutile car – attachez vos ceintures – les "grands hommes n'eurent jamais, ni de près ni de loin, le moindre besoin d'être subventionnés par qui que ce soit".

PICASSO PLUS RICHE QUE MICK JAGGER

Mieux : "les artistes véritables", ajoute-t-il, "et les écrivains les plus authentiques n'ont jamais été des marginaux, méconnus ou miséreux". Opposant les vrais artistes aux faux – dans une rhétorique qui n'est pas sans rappeler celle de Nicolas Sarkozy louant les vertus du " vrai travail " –, l'ancien ministre s'empresse d'attribuer des certificats. Et de classer dans la catégorie des vrais un Picasso plus riche que Mick Jagger, le " très fortuné " Voltaire ou bien encore le célébrissime Kant, aux conférences de qui " ministres et grands bourgeois se pressaient comme à une finale de Roland-Garros " (bonjour la comparaison...).

Dans tous les cas, l'équation est simple : ce qui prouve le talent d'un artiste et qui vient légitimer son statut, c'est d'abord sa capacité à gagner de l'argent et à devenir une "célébrité médiatique". Hors du royaume du fric et du vedettariat, point de salut : tout n'est qu'imposture. Faut-il seulement rappeler à Luc Ferry qu'à l'inverse total de ce qu'il affirme, un grand nombre d'artistes ont créé à la marge, que Lautréamont ne connut pas une once de succès de son vivant, que Van Gogh mourut en n'ayant vendu qu'un seul tableau et qu'à la fin de sa vie, Baudelaire lui-même était criblé de dettes et donnait des conférences qui ne déplaçaient plus les foules.

UNE FORME DE POPULISME PASSABLEMENT INQUIÉTANTE

Avec les mots de Dubuffet, il n'est pas inutile de lui faire remarquer que les chefs-d'œuvre mondialement connus devant lesquels il se prosterne ne constituent pas non plus forcément le meilleur et le plus important de la pensée d'une époque car leur " conservation résulte seulement de ce qu'un petit cénacle les a choisis et applaudis en éliminant tous les autres ". Il serait tout à fait naïf de penser que la culture se réduit à la courte liste des œuvres sélectionnées, promues, enseignées, et de ne pas voir qu'elle excède de très loin l'infime partie des productions matérielles sanctuarisées jusqu'ici.

Du reste, si Luc Ferry proposait de supprimer la subvention publique dans tous les domaines de la création, on pourrait au moins lui reconnaître une certaine logique. Hélas, il préfère exploiter le bon gros poncif qui consiste à dénigrer l'" art comptant pour rien ", prétendument hermétique et décadent, et stigmatiser une "camelote à prix d'or" achetée en prenant "dans nos poches". De ce triste inventaire à la Combien ça coûte ? découle une forme de populisme passablement inquiétante, notamment lorsque Luc Ferry déclare, à propos des " choses immondes " acquises par les FRAC, qu'il faudrait tout simplement "nous en débarrasser "... Imaginer un seul instant que cet homme fut chargé de faire notre éducation nationale laisse pour le moins songeur.

Qu'on se rassure cependant : Luc Ferry remplit lui-même les critères dont il use pour déterminer la valeur des " grands". Entre les conférences, les coffrets de disques retraçant l'histoire de la philosophie ou encore les croisières de luxe en sa " présence exceptionnelle ", il n'est ni miséreux, ni méconnu. Le Ministère de la Culture, toujours enclin à exercer son sens de l'humour, l'a d'ailleurs retenu pour parrainer une nouvelle manifestation qui s'annonce d'ores et déjà haute en couleurs : la " Fête de la Philo ". Espérons seulement qu'il saura contribuer au salut de cette noble discipline en s'abstenant d'y parler d'art.

Thibaud Croisy (artiste)



Il faut le reconnaître : on ne lit pas régulièrement les chroniques que Luc Ferry publie dans Le Figaro. C'est pourtant là une chose fort regrettable car un peu plus d'assiduité nous permettrait sans doute d'en apprendre davantage sur le regard qu'un homme politique peut porter sur l'art. Ainsi, dans son dernier article intitulé " Fric-Frac : des impostures de l'art contemporain " (16 mai 2013), Luc Ferry livre un très violent réquisitoire contre les Fonds régionaux d'art contemporain (FRAC) qu'il n'hésite pas à qualifier de " temples de l'inculture ".

Impossible de savoir s'il les a déjà fréquentés mais après tout, peu importe : il assure avoir lu une " excellente enquête " sur le sujet dans le magazine économique Capital – sans doute si excellente qu'elle lui suffit à fonder toutes ses prises de position. Sur un ton peu académique, Luc Ferry s'en prend donc à cette "fadaise de gauche" selon laquelle l'art contemporain doit être subventionné par de l'argent public et en profite pour brocarder les artistes accueillis par les FRAC, ces gens "sans art et sans talent" qu'il accuse même d'exploiter lesdits établissements pour " écouler leurs productions indigentes aux frais du contribuable ".

De la part d'un prof de philo qui touchait un salaire de l'Université Paris-VII sans y donner le moindre cours puis qui s'était fait rembourser ses indemnités par Matignon quand l'Université les lui réclamait, la critique peut sembler cocasse. Elle serait d'ailleurs simplement ridicule si elle n'était agrémentée de quelques contre-vérités notoires. A en croire Luc Ferry, soutenir la création avec de l'argent public serait parfaitement inutile car – attachez vos ceintures – les "grands hommes n'eurent jamais, ni de près ni de loin, le moindre besoin d'être subventionnés par qui que ce soit".

PICASSO PLUS RICHE QUE MICK JAGGER

Mieux : "les artistes véritables", ajoute-t-il, "et les écrivains les plus authentiques n'ont jamais été des marginaux, méconnus ou miséreux". Opposant les vrais artistes aux faux – dans une rhétorique qui n'est pas sans rappeler celle de Nicolas Sarkozy louant les vertus du " vrai travail " –, l'ancien ministre s'empresse d'attribuer des certificats. Et de classer dans la catégorie des vrais un Picasso plus riche que Mick Jagger, le " très fortuné " Voltaire ou bien encore le célébrissime Kant, aux conférences de qui " ministres et grands bourgeois se pressaient comme à une finale de Roland-Garros " (bonjour la comparaison...).

Dans tous les cas, l'équation est simple : ce qui prouve le talent d'un artiste et qui vient légitimer son statut, c'est d'abord sa capacité à gagner de l'argent et à devenir une "célébrité médiatique". Hors du royaume du fric et du vedettariat, point de salut : tout n'est qu'imposture. Faut-il seulement rappeler à Luc Ferry qu'à l'inverse total de ce qu'il affirme, un grand nombre d'artistes ont créé à la marge, que Lautréamont ne connut pas une once de succès de son vivant, que Van Gogh mourut en n'ayant vendu qu'un seul tableau et qu'à la fin de sa vie, Baudelaire lui-même était criblé de dettes et donnait des conférences qui ne déplaçaient plus les foules.

UNE FORME DE POPULISME PASSABLEMENT INQUIÉTANTE

Avec les mots de Dubuffet, il n'est pas inutile de lui faire remarquer que les chefs-d'œuvre mondialement connus devant lesquels il se prosterne ne constituent pas non plus forcément le meilleur et le plus important de la pensée d'une époque car leur " conservation résulte seulement de ce qu'un petit cénacle les a choisis et applaudis en éliminant tous les autres ". Il serait tout à fait naïf de penser que la culture se réduit à la courte liste des œuvres sélectionnées, promues, enseignées, et de ne pas voir qu'elle excède de très loin l'infime partie des productions matérielles sanctuarisées jusqu'ici.

Du reste, si Luc Ferry proposait de supprimer la subvention publique dans tous les domaines de la création, on pourrait au moins lui reconnaître une certaine logique. Hélas, il préfère exploiter le bon gros poncif qui consiste à dénigrer l'" art comptant pour rien ", prétendument hermétique et décadent, et stigmatiser une "camelote à prix d'or" achetée en prenant "dans nos poches". De ce triste inventaire à la Combien ça coûte ? découle une forme de populisme passablement inquiétante, notamment lorsque Luc Ferry déclare, à propos des " choses immondes " acquises par les FRAC, qu'il faudrait tout simplement "nous en débarrasser "... Imaginer un seul instant que cet homme fut chargé de faire notre éducation nationale laisse pour le moins songeur.

Qu'on se rassure cependant : Luc Ferry remplit lui-même les critères dont il use pour déterminer la valeur des " grands". Entre les conférences, les coffrets de disques retraçant l'histoire de la philosophie ou encore les croisières de luxe en sa " présence exceptionnelle ", il n'est ni miséreux, ni méconnu. Le Ministère de la Culture, toujours enclin à exercer son sens de l'humour, l'a d'ailleurs retenu pour parrainer une nouvelle manifestation qui s'annonce d'ores et déjà haute en couleurs : la " Fête de la Philo ". Espérons seulement qu'il saura contribuer au salut de cette noble discipline en s'abstenant d'y parler d'art.

Thibaud Croisy (artiste)

P.s: À cette rencontre, on n'oubliera pas d'inviter des artistes aussi.


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Idées


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Et on remercie Le Monde, car sans les médias, le monde tournerait autrement... Mais à force... les acteurs médiatiques finiront par comprendre...

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