Les bonnes excuses des démocraties pour contrôler le Web
Sécurité nationale, lutte contre le terrorisme, la pédopornographie ou le cybercrime en général, protection de la propriété intellectuelle... Autant de sujets qui relèguent la liberté de circulation de l’information en ligne au second plan aux yeux de plus en plus de gouvernements réputés démocratiques. Ceux-là mêmes qui crient haut et fort ailleurs l’importance d’un Internet libre.
Sous couvert de la lutte légitime contre la pédophilie, le Canada a élaboré un projet de loi liberticide pour le Net 19 . La surveillance du Net s’intensifie en Inde depuis les attentats de Bombay en 2008 20 . Au Royaume-Uni, le gouvernement de David Cameron soutient le “Communications Capabilities Development Programme”, un projet de loi visant à renforcer la surveillance des communications électroniques et téléphoniques des citoyens britanniques 21 , qui a tout lieu de susciter de graves inquiétudes.
La proposition de loi Cyber Intelligence Sharing and Protection Act of 2011 (Cispa), en examen au Congrès américain 22 , autoriserait le gouvernement et des entreprises, au nom de la lutte contre le cybercrime, à mettre en place une forme de surveillance démesurée, voire une censure du Web. Elle pourrait même être utilisée pour réduire au silence des sites d’information qui publient des dossiers ou éléments classifiés. D’ailleurs, les discours des officiels américains sur l’importance de la lutte contre la cybercensure et leur financement d’outils de contournement de la censure, est contredit par le traitement réservé à WikiLeaks et à ses collaborateurs (lire le rapport de RSF sur Les États-unis et Internet 23 ).
En France, la loi Hadopi prévoit la coupure de l’accès à Internet pour lutter contre le téléchargement illégal. Les projets de loi américains liberticides Sopa (Stop Online Piracy Act) et Pipa (Protect intellectual Property Act)) 24, qui sacrifiaient la liberté d’expression en ligne à la protection du droit d’auteur se sont heurtés à une immense mobilisation internationale, marqué par le blackout, pendant 24 heures, du site de Wikipedia en anglais.
Ce mouvement de mobilisation a par la suite entraîné la mort du traité anti-contrefaçon Acta (Anti-Counterfeiting Trade Agreement ou Accord commercial anti-contrefaçon) 25 , officiellement destiné à protéger la propriété intellectuelle, enterré par le Parlement européen en juillet 2012. La vigilance doit cependant rester de mise. Le Canada Europe Trade Agreement (Ceta) est qualifiée par l’ONG La Quadrature du Net de “Zombie d’Acta” 26 . La directive européenne anti-partage Ipred (Intellectual Property Rights Enforcement Directive) 27 pourrait également susciter un filtrage massif du Web. Un coup de plus porté à la neutralité du Net.
La fin du World Wide Web?
L’Internet chinois, ‘Chinternet’, l’Internet ouzbek, “UzNet’, n’ont rien à voir avec le Web tel que conçu par les fondateurs du Web ou expérimenté quotidiennement par les internautes français, brésiliens ou sud-africains. La compartimention de la Toile s’accélère. Les autorités iraniennes annoncent depuis des mois le lancement d’un Internet national, respectueux des valeurs de la République islamique et déconnectés du World Wide Web.
Le constat est sans appel : utilisée à tour de bras par de nombreux régimes répressifs, réhabilitée par des régimes démocratiques au nom de considérations apparemment acceptables, mais trop souvent instrumentalisée, la cybercensure avance, sous différents aspects, de manière de plus en plus pernicieuse et efficace, et les internautes apparaissent trop souvent vulnérables.
Pourtant, la résistance s’organise. Des passerelles se créent entre blogosphères. Les campagnes de mobilisation pour obtenir la libération de tel ou tel blogueur traversent les frontières. Des conseils techniques ou des expériences pratiques sont partagées au-delà des cercles habituels de militants des droits de l’homme. Hacktivistes, journalistes, net-citoyens ou adeptes des réseaux sociaux apprennent à travailler ensemble pour mieux contourner la censure, à s’adapter techniquement aux progrès des censeurs, et à échapper — au moins un temps — à la surveillance. Face à de grandes murailles électroniques de plus en plus imposantes, ces acteurs du Web font preuve de toujours plus de créativité pour exploiter les failles qu’ils parviennent à identifier.
Lucie Morillon, Responsable de la Recherche et du Bureau Nouveaux Médias de Reporters sans frontières
Mise en ligne : octobre 2012
Le 5 juillet 2012, le Conseil des droits de l'homme de l'ONU affirmait pour la première fois le droit à la liberté d'expression sur Internet, estimant que les droits en vigueur hors ligne devaient être reconnus de la même manière en ligne, à travers n'importe quel média, et indépendamment des frontières. La résolution appelait tous les Etats “à promouvoir et à faciliter l'accès à Internet et la coopération internationale visant à faciliter le développement des médias et des communications dans tous les pays”. Sur le papier, tout était dit.
https://www.wefightcensorship.org/fr/cybercensure-mondehtml.html#bonnesexcuses
http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:C:2010:083:0389:0403:FR:PDF
La charte est applicable aux institutions européennes dans le respect du principe de subsidiarité et en aucun cas elle ne peut étendre les compétences et les tâches que les traités leur confèrent. Elle est également applicable aux pays de l’UE lorsqu’ils mettent en œuvre la législation de l’UE.
http://europa.eu/legislation_summaries/justice_freedom_security/combating_discrimination/l33501_fr.htm
Le principe de subsidiarité: une idée de billet. Les féministes sont invitées. Je m'excuse de ne pas rester dans le cadre du billet, c'est à dire l'Etat. Qu'en penserait la commissaire européenne à l'agenda numérique?
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