dinsdag 30 juni 2015

Les machines nous aident, on simplifie...

Union européenne - Séminaire franco-néerlandais sur la simplification : «Un impératif national et européen » - Discours de M. Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères et du développement international (Paris, 17/06/2015)
Monsieur le Ministre,

Cher Bert [Koenders, Ministre des Affaires étrangères des Pays-Bas],

Mesdames et Messieurs,

Chers Amis,

L'amitié entre les Pays-Bas et la France est capable de faire des miracles. La preuve c'est qu'il est 8h30 et que nous sommes tous là.

Nous avons choisi un thème : faire plus simple au sein de l'Union européenne. Comment est née cette idée ? C'est lors de la visite du président français à La Haye en janvier 2014 que nous avions pris la décision d'organiser ensemble, Pays-Bas et France, ce séminaire à Paris. Je veux vraiment remercier mon ami Bert [Koenders] pour sa présence et pour la qualité de notre coopération. J'ajoute un mot plus personnel : lorsque l'on peut travailler en amitié entre deux pays et qu'en plus cela se double d'une amitié personnelle, c'est un plaisir supplémentaire.

Europe et simplicité : disons que pour beaucoup de nos concitoyens, ces deux mots, comme on dit au Quai d'Orsay, ne sont pas immédiatement compatibles. Il y a eu un sondage en France il y a trois ou quatre ans qui indiquait que 75 % des personnes interrogées associaient l'Union européenne à l'adjectif «complexe». Je ne sais pas ce qu'il en est dans plusieurs des pays ici représentés mais je ne crois pas qu'il s'agisse d'une particularité française. L'objectif de ce séminaire est de réfléchir aux améliorations possibles. En même temps, il faut que nous évitions au début de cette réunion de nous montrer naïfs ou, ce qui est pire, démagogues.

L'Union européenne comporte une part inévitable de sophistication. Quand 28 pays décident de partager leur souveraineté dans plusieurs domaines importants, il est impossible d'éviter toute complexité. La complexité existe dans chaque démocratie et on ne voit pas comment elle serait moins forte lorsqu'un système politique regroupe 28 États. Il faut accepter une certaine part de complexité et l'expliquer.

Mais cela m'amène à distinguer deux formes de complexité : une complexité légitime d'une part, que nous devons assumer et qui doit nous conduire à renforcer notre pédagogie vis-à-vis des citoyens ; et une complexité injustifiée d'autre part, que nous devons pourchasser et corriger. Quand l'Union européenne consulte des États membres et la société civile, quand elle cherche à élaborer des règles pertinentes, parfois il y a des procédures complexes, mais celles-ci sont légitimes. Quand en revanche l'Union se montre intrusive, quand elle établit des normes superflues, quand pour parler clairement elle s'occupe de queues de cerises, alors là il y a une source de complexité à corriger : c'est dans ces cas-là que la simplification constitue un impératif.

Un impératif de quel ordre ? D'abord un impératif démocratique. Pour ce qui concerne la France, une majorité de nos concitoyens continuent de croire en l'idée européenne, mais la complexité du fonctionnement de l'Union et de ses normes fait partie des raisons pour lesquelles il y a une certaine désaffection envers non pas l'idée européenne mais envers la pratique européenne. Et parfois les deux éléments sont confondus. Et à partir de cette complexité le sentiment est répandu, notamment par les populistes, que l'Union décide sans les peuples et parfois même contre les peuples. Il est donc nécessaire pour des raisons démocratiques d'aller vers une simplification.

Ensuite c'est aussi un impératif économique. Trop souvent, les normes européennes sont perçues comme des sources supplémentaires de complexité, en particulier pour les PME à un moment où notre problème majeur est celui de l'emploi et singulièrement l'emploi des jeunes. Il faut que nous fixions, que nous garantissions que les règles fixées pour l'élaboration des normes européennes permettent d'éviter ces excès au nom même d'une nécessité économique.

L'impératif de simplification ne s'applique pas seulement à l'Union européenne : il concerne aussi chaque État membre. Il est vrai de la France, comme j'imagine des Pays-Bas. En ce qui concerne la France, nous avons lancé il y a quelques temps une vaste opération, que nous appelons un «choc de simplification» pour essayer de simplifier tout ce qui peut l'être. Tout à l'heure, le Secrétaire d'État qui est chargé de cela, M. Thierry Mandon, vous expliquera ce que nous faisons d'une manière plus précise. Un exemple : nous avions jusqu'à maintenant 22 régions, avec des compétences un peu entremêlées avec les communes ; maintenant, nous en avons 13 et je pense que les compétences sont un peu plus claires.

Les efforts de simplification doivent donc être menés de manière cohérente à l'échelle de l'Union et au plan national. Si chacun agit «en silo», on ne s'en sortira pas. Nous avons tout un travail d'échange de bonne pratique et je pense que cela sera un des côtés positifs de ce séminaire.

J'en viens maintenant à la question centrale : comment simplifier ? Un préalable consiste à se mettre d'accord, à 28, sur le sens de l'effort recherché, car le terme peut avoir un sens différent selon les États membres : réforme pour certains, dérégulation pour d'autres. Il faut, je crois, s'en tenir à quelques principes clairs. J'évoquerai trois chantiers principaux.

D'abord l'amélioration des procédures entre les institutions européennes. Il faut éviter, si on veut avoir des normes efficaces, d'avoir des blocages institutionnels et des querelles de chapelles. Ce qui veut dire la pleine association du Conseil et du Parlement européen à la préparation du programme de travail annuel de la Commission par exemple : c'est une des améliorations possibles. Le point de vue des États membres doit être systématiquement pris en compte dans l'élaboration par la Commission des normes que les traités européens appellent les actes délégués et qui jouent un rôle central dans la législation européenne. Au fond, il s'agit d'appliquer un principe auquel nous tenons, tout comme d'ailleurs nos amis des Pays-Bas, celui de la subsidiarité. Il faut vraiment que cette idée de subsidiarité soit appliquée dans tous les domaines. C'est le premier chantier.

Le deuxième chantier consiste à mieux prendre en compte, dans l'élaboration du droit, les besoins de ceux auxquels la norme européenne est destinée. D'abord, une plus grande lisibilité. Le droit de l'Union a connu des stratifications : certains textes sont dépassés, ils doivent être abrogés ; certains éléments doivent être codifiés. Nous avons réalisé en France ce travail de codification. C'est un travail ingrat mais c'est un travail nécessaire et je pense que c'est indispensable pour une plus grande lisibilité des normes.

Ensuite, une meilleure évaluation de la norme, ex ante et ex post. D'où l'importance d'études d'impact. Ce qui veut dire des clauses de rendez-vous pour évaluer la mise en oeuvre des législations, ainsi que l'inclusion de clauses d'adaptation dans les domaines qui évoluent rapidement, comme le numérique. La simplification implique aussi une meilleure consultation des principaux intéressés : les citoyens, les entreprises, les «utilisateurs finaux» des législations européennes. Nous pensons qu'il faut renforcer les possibilités pour la société civile de donner son opinion sur la législation existante, sur les textes en cours de préparation.

Du même coup, ce chantier doit aussi être celui de la transparence. On parle beaucoup des lobbies. On les estime à 30000, presque autant que le nombre de fonctionnaires de la Commission européenne. Ce chiffre est révélateur de l'importance des décisions prises à Bruxelles. Mais il ne doit pas être synonyme d'influences opaques. C'est pourquoi, tout au long de la procédure législative, de la proposition à la publication, l'effort doit être constant pour rendre les termes du débat publics et transparents. Les efforts de la Commission Juncker en ce sens doivent être encouragés : par l'exemple, l'obligation faite aux Commissaires, aux membres de cabinet et aux directeurs de rendre publics leurs rendez-vous avec les «représentants d'influence» va dans le bon sens.

Enfin - troisième axe -, il faut mieux articuler les efforts de simplification que conduisent les Etats membres avec ceux menés à Bruxelles. L'idée selon laquelle des bonnes pratiques ayant fait leurs preuves dans les Etats puissent être transposées dans l'ensemble de l'Union est une bonne idée. A cet égard, les Parlements nationaux peuvent jouer un rôle, soit dans le cadre du dialogue entre eux et le Parlement européen, notamment au sein de la COSAC, soit dans le cadre du dialogue entre les Parlements nationaux et la Commission européenne.

La Commission européenne a présenté le mois dernier une stratégie dont l'un des objectifs est la simplification. Le Conseil va négocier avec la Commission à ce sujet, et je souhaiterais qu'à cette occasion nous puissions apporter des améliorations concrètes dans ce domaine. Pendant cette négociation, la coopération entre la France et les Pays-Bas doit être précieuse pour faire émerger des solutions que vous allez dégager au cours de cette matinée de travail.

Mesdames et Messieurs,

L'impératif de simplification est national et européen. Il doit se traduire de différentes manières : réduire les charges inutiles, renoncer aux législations obsolètes, mais aussi agir davantage au plan européen, lorsque c'est utile, car c'est souvent l'adoption d'une norme européenne unique qui permet la simplification. Pour une PME qui exporte dans les autres Etats membres, mieux vaut une norme que 28 et mieux vaut une monnaie que plusieurs.

Simplifier, ce n'est pas détricoter l'acquis, ou revenir sur la répartition des compétences. Ce n'est pas remettre en cause les principes fondamentaux de la construction européenne, l'intégrité du marché intérieur, la libre circulation des personnes, la PAC ou toute autre politique commune qui incarne la construction européenne. Simplifier, c'est répondre à un double défi : être plus efficace et être plus démocratique. Pour cela, il faut s'appuyer sur nos Etats membres et sur les initiatives qui y sont prises.

Simplifier, c'est un point très important dans notre projet. L'Europe doit se concentrer sur l'essentiel, c'est-à-dire faciliter la vie de ses citoyens et de ses entreprises. C'est la tâche de ce séminaire et je suis extrêmement heureux et, c'est très significatif, qu'il ait lieu avec nos amis néerlandais.

Les Pays-Bas vont présider le Conseil de l'Union européenne, au début de l'année prochaine. Ils savent qu'ils peuvent compter sur la France tant, dans tous les travaux quotidiens et pour les grandes décisions, les Pays-Bas et la France sont côte à côte : c'est un atout considérable.
Et, pour ne rien simplifier, je terminerai par les mots de Leonard de Vinci : «La simplicité est la sophistication suprême». Donc soyons simples, ce qui ne veut pas dire « soyons simplistes ».

Je suis sûr que cette matinée de travail sera fructueuse. Je retiens notre volonté commune de simplification, notre attachement à l'Europe et - chacun ici en est convaincu - le fait que Pays-Bas et France sont vraiment décidés à travailler ensemble.

Et puis, il y a des signes qui ne trompent pas : le Tour de France, au mois de juillet, va partir des Pays-Bas et il y aura ces évènements significatifs pour les cyclistes dont beaucoup d'entre font partie : la plus haute récompense de la République sera remise à Joop Zoetemelk et à Jan Janssen !

De plus, comme on lance l'année économique ensemble, on va travailler de concert pendant toute l'année et l'année prochaine. Cela nous donne beaucoup d'énergie et beaucoup d'optimisme.

Merci Cher Bert d'être ici.

Bon travail à vous toutes et à vous tous, avec ce mot d'ordre : simplifier !./.

(source: http://basedoc.diplomatie.gouv.fr/vues/Kiosque/FranceDiplomatie/kiosque.php?fichier=bafr2015-06-17.html#Chapitre7)

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