Art contemporain
Où va cet âne ?
Deux œuvres, deux époques. Lorsqu’on le rapproche du « Radeau de la “Méduse” », de Théodore Géricault, l’âne photographié sur une barque par Paola Pivi révèle certaines des caractéristiques du monde actuel : amorphe, éclaté, résigné. Un monde que nombre d’artistes se contentent de refléter, sans instaurer avec lui de distance critique.
par Ikonotekst groupe - Artistes réunis, novembre 2012
Aperçu
Où va l’économie dans un espace de spéculation financière ?
Où va la démocratie dans un Etat qui abdique son pouvoir d’intervention économique ?
Et où va cet âne posé sur une barque qui dérive en pleine mer ?
Mystère.
Au moins, pour l’âne, on sait que c’est Paola Pivi, artiste de renommée internationale, qui l’a placé en 2003 sur une barque, l’a photographié et, depuis des années, nous le montre sans que nous puissions savoir où il se trouve actuellement.
Mais pourquoi s’intéresser à un âne errant, alors qu’il semble bien que l’époque offre d’autres sujets de préoccupation ? Peut-être parce qu’à bien l’examiner, notre vue gagnerait en acuité, y compris sur les autres sujets de préoccupation.
Pour ce faire, il faut mettre côte à côte la photographie de Pivi et la représentation d’une autre embarcation : Le Radeau de la « Méduse », du peintre Théodore Géricault.
Il est peu vraisemblable qu’un âne monte dans une barque et lève les amarres. Pivi l’a très certainement fait poser sur la barque, l’a éloigné du bord de l’eau et a pris des photographies ; de vraies photographies (et non des photomontages numériques), qui exhibent une mise en scène d’éléments réels. A l’inverse, Le Radeau de la « Méduse » (1818-1819) se réfère à un événement réel : le naufrage de la frégate Méduse au large des côtes de l’actuelle Mauritanie, en juillet 1816. Il dépeint le moment où un groupe de rescapés sur un radeau aperçoit au loin le brick Argus.
Pour exécuter cette œuvre, Géricault a rassemblé de nombreux documents, fait plusieurs dessins et construit un modèle réduit du radeau. Son tableau entend exposer, par une reconstitution imaginaire, un événement réel. Au contraire, la photo de Pivi constitue un enregistrement visuel fidèle d’une réalité fictive : dériver sur les flots n’est pas la condition habituelle des ânes. L’âne flottant est réaliste, mais énigmatique. Que peut bien signifier cette construction d’image ?
Chez Pivi, l’horizon est vide. Chez Géricault, on aperçoit un bateau dans le lointain. Les passagers du radeau, malgré leur (...)
http://www.monde-diplomatique.fr/2012/11/IKONOTEKST_GROUPE___ARTISTES_REUNIS/48374
Où va la démocratie dans un Etat qui abdique son pouvoir d’intervention économique ?
Et où va cet âne posé sur une barque qui dérive en pleine mer ?
Mystère.
Au moins, pour l’âne, on sait que c’est Paola Pivi, artiste de renommée internationale, qui l’a placé en 2003 sur une barque, l’a photographié et, depuis des années, nous le montre sans que nous puissions savoir où il se trouve actuellement.
Mais pourquoi s’intéresser à un âne errant, alors qu’il semble bien que l’époque offre d’autres sujets de préoccupation ? Peut-être parce qu’à bien l’examiner, notre vue gagnerait en acuité, y compris sur les autres sujets de préoccupation.
Pour ce faire, il faut mettre côte à côte la photographie de Pivi et la représentation d’une autre embarcation : Le Radeau de la « Méduse », du peintre Théodore Géricault.
Il est peu vraisemblable qu’un âne monte dans une barque et lève les amarres. Pivi l’a très certainement fait poser sur la barque, l’a éloigné du bord de l’eau et a pris des photographies ; de vraies photographies (et non des photomontages numériques), qui exhibent une mise en scène d’éléments réels. A l’inverse, Le Radeau de la « Méduse » (1818-1819) se réfère à un événement réel : le naufrage de la frégate Méduse au large des côtes de l’actuelle Mauritanie, en juillet 1816. Il dépeint le moment où un groupe de rescapés sur un radeau aperçoit au loin le brick Argus.
Pour exécuter cette œuvre, Géricault a rassemblé de nombreux documents, fait plusieurs dessins et construit un modèle réduit du radeau. Son tableau entend exposer, par une reconstitution imaginaire, un événement réel. Au contraire, la photo de Pivi constitue un enregistrement visuel fidèle d’une réalité fictive : dériver sur les flots n’est pas la condition habituelle des ânes. L’âne flottant est réaliste, mais énigmatique. Que peut bien signifier cette construction d’image ?
Chez Pivi, l’horizon est vide. Chez Géricault, on aperçoit un bateau dans le lointain. Les passagers du radeau, malgré leur (...)
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